mercredi 21 mars 2012

Haïti l'enfante, le Canada la propulse et l'Angleterre la consacre !


Michaëlle Jean est bien le nom de cette personnalité, de cette femme qui continue d'assurer la grandeur de ses origines ancestrales, en traversant les frontières pour partager un ensemble de valeurs propres à la terre d'Haïti et compatibles avec l'universalité. Elle symbolise ainsi le pouvoir de la sagesse féminine. Ceci des siècles après le passage de la reine Anacaona sur cette terre reconnue pour être la matrice de la liberté. Un modèle non-étranger, ni exotique, pour célébrer la Journée internationale de la Femme.

Haïti: Femme journaliste, militante pour les droits des femmes, ex-gouverneure du Canada, et actuellement Envoyée spéciale de l'Unesco pour Haïti, Michaëlle Jean est devenue au fil des ans, du petit écran jusqu'aux grands salons, celle qui s'impose en toute intelligence et élégance. Celle qui a su exploiter ses origines du pays le plus marginalisé du continent américain, pour gouverner le deuxième pays le plus riche de l'hémisphère. En politique, il n'y a pas de cadeau. Encore moins si on est femme, d'origine haïtienne en plus.

L'attachement à l'éducation, à la promotion continue d'un certain nombre de valeurs, à l'intelligence stratégique et à l'intelligence pour les négociations, semblent avoir considérablement aidé la nièce du poète René Depestre, qui deviendra Commandante en chef de l'armée canadienne. Poste qui a conduit Michaëlle Jean, le 8 mars 2007, à l'époque gouverneure du Canada, en Afghanistan pour visiter les soldats canadiens. C'était l'occasion pour cet enfant descendant de « marron », de sympathiser aux sorts des femmes en particulier, et celui du peuple afghan. Elle effectuera plusieurs autres voyages officiels notamment en Afrique du Sud, en Algérie, en Argentine, au Brésil, aux États-Unis, au Ghana, au Mali, au Maroc, en République tchèque, etc.

Les dimensions culturelles de Michaëlle Jean

La vie en rose n'a jamais existé. Et ce n'est pas Michaëlle Jean qui nous dira le contraire. Née en 1957 en Haïti, une période qui dit bien son nom et surtout « non ! », à l'établissement d'un ensemble de principes démocratiques élémentaires. Onze ans plus tard, soit en 1968, sa famille a été contrainte de fuir Haïti, afin d'éviter de faire les frais de la dictature de François Duvalier pour s'établir au Canada, spécialement à Québec. Et c'est le point de départ pour cette petite fille de Port-au-Prince qui deviendra la représentante de la reine d'Angleterre comme par une lignée royale.

Inédite comme son pays d'origine, Michaëlle Jean fait partie de cette exception à la règle pour avoir créé une première dans l'histoire de la famille vice-royale au Canada par son origine haïtienne, celle de son mari, le cinéaste et philosophe français Jean-Daniel Lafond et de leur fille adoptive Marie-Éden, née en Haïti. Tous sont nés en dehors des frontières du Canada et encore moins des royaumes du Commonwealth. Ce qui n'a pas pour autant affecter ni le prestige de Michaëlle pour accéder au poste, ni les missions de celle-ci auprès de la reine Elisabeth II.

Les visions et les langages partagés 

Autant d'expériences ascensionnelles et parallèles en tant qu'enseignante, puis comme employée au sein de Soutien aux femmes victimes de violences conjugales. Michaëlle Jean se lancera par la suite au sein des médias comme Radio-Canada à partir de 1988, et suivi de CBC Télévision (l'homologue anglophone de la Télévision de Radio-Canada), à plusieurs titres, ce qui lui permettra de camper une stature de premier plan, entre ses rencontres et ses performances.

La maîtrise de plusieurs langues telles l'anglais, le français, l'espagnol, l'italien, le créole a été un facteur déterminant dans le parcours de cette journaliste de carrière, qui a fait au Canada un baccalauréat en langues et littératures hispaniques et italiennes, et une maîtrise en littérature comparée à l'Université de Montréal. Sans compter les nombreux prix et distinctions pour les plus honorifiques décernés à cet enfant de la capitale d'Haïti, qui lors d'une récente visite en 2011, en terre natale, à visiter le temple de l'Ati national, Max Beauvoir, pour s'entretenir pendant plusieurs heures.

Deux « Simbis », esprits des eaux dans la culture haïtienne, loas selon les traditions ancestrales, qui apaisent les âmes, purifient les eaux troubles et interviennent avec sagesse et clairvoyance. Au-dessus de l'écu, le coquillage et la chaîne brisée qui rappellent le célèbre et infatigable « Nèg Maron » ou Marron inconnu, statut qui porte les empreintes d'Albert Mangonès. Et le tout s'agencera avec un palmier, symbole de paix imprimé au centre du drapeau haïtien. Ce sont autant d'éléments symboliques et mystiques attachés à l'histoire et à la culture haïtienne, comme le vaudou, qui se combine avec d'autres emblèmes, cette fois-ci beaucoup plus associés aux valeurs du Canada tels un dollar de sable. On observe en ce sens un roc orné avec un pin, qui évoque les richesses naturelles du Canada, une couronne, l'inscription de la devise et des objectifs personnels de la vice-reine intitulée « Briser les solitudes », un anneau portant la devise de l'Ordre du Canada (ils veulent une patrie meilleure), etc. pour converger la vision, le prestige, le pouvoir et l'énergie diffusés dans l'armoirie, plein de sens profond et enracinée, associée au règne de Michaëlle Jean, 27e gouverneure du Canada.

Les dimensions politiques de la Gouverneure du Canada

La plus haute fonction politique jusqu'à date que Michaëlle Jean ait occupé du 27 septembre 2005 au 1 octobre 2010) fut la gouverneure générale du Canada. Ce poste a ainsi conduit madame Jean à présider à l'assermentation du Premier ministre, du juge en chef du Canada et des ministres du cabinet. Elle disposait aussi du plein pouvoir de convoquer, de proroger et de dissoudre le Parlement, de prononcer le discours du Trône et d'accorder la sanction royale aux mesures législatives parlementaires.  

Elle avait aussi le pouvoir de signer les documents officiels du Canada et de rencontrer du même coup, de manière régulière, le Premier ministre. Elle a aussi veillé à ce que le Canada ait toujours un Premier ministre et un gouvernement en place qui ait la confiance du Parlement. En plus, elle disposait encore de certains pouvoirs discrétionnaires après avoir prononcé son serment d'allégeance à la reine d'Angleterre.

Les dimensions diplomatiques de la représentante de l'Unesco pour Haïti

Désormais une nouvelle mission a été attribuée à l'ancienne gouverneure du Canada, qui doit cette fois-ci contribuer au redressement de sa terre natale, après le séisme du 12 janvier. A titre d'Envoyée spéciale de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco) en Haïti depuis le 1er octobre 2010, Michaëlle Jean devra miser sur son parcours et ses carnets d'adresses, pour d'obtenir des fonds pour la reconstruction du secteur culturel haïtien notamment dans le domaine du patrimoine haïtien et celui de l'éducation. Deux secteurs stratégiques pour lesquels les urgences ne manquent pas.

Faisant ainsi suite aux nombreux engagements pris par madame Irina Brokovar, directrice générale de l'Unesco, au cours de sa visite en Haïti en 2010, lors de ces rencontres avec la ministre de la culture d'alors, Marie Laurence Jocelyn Lassègue. De la volonté à la matérialisation des visions, Michaëlle Jean devrait notamment à travers ses multiples rencontres, sous la présidence de Michel Martelly, tout mettre en oeuvre pour laisser à la fin de son mandat un bilan pratique, pertinent et durable dans ces domaines respectifs.

Dans la perspective de garder le même élan de promotion pour sa terre natale; ceci avec éventuellement des impacts visibles dans différents domaines, certains observateurs pensent, à défaut de créer une chaire à « Michaëlle Jean pour la promotion des droit des femmes en Haïti » au sein de l'université haïtienne, en ce qui a trait à la question de genre.

Chancelière à l'Université d'Ottawa, ce personnage qui a su si bien jongler entre la presse, la culture, la lutte pour l'équité et le pouvoir, pourrait grandement servir de modèles à cette tranche majoritaire de la population haïtienne, dont les écolières, les étudiantes et les futures femmes politiques et diplomates haïtiennes dans certains points et contextes particuliers.

Michaëlle Jean à la rencontre des femmes haïtiennes

Madame Jean s'est rendue en Haïti à le mardi 6 mars 2012 pour participer au Forum national sur la problématique de la femme haïtienne, qui a eu lieu à Port-au- Prince du 6 au 8 mars. Ce grand rassemblement qui a réuni près de 600 femmes provenant des 144 communes du pays permettra de dégager les pistes de politiques qui constitueront le cahier de charges de la ministre à la Condition féminine et aux droits des femmes d'Haïti, Marie Yanick Mézil. A la clôture du forum, l'ex-gouverneure générale du Canada témoignera sa solidarité à l'égard des femmes d'Haïti.

Crise politique : reactions de Michaëlle Jean

L'Envoyée spéciale de l'Unesco reconnaît qu'avec la démission récente du Premier ministre Garry Conille, le pays est une fois de plus plongé dans une crise politique qui ne fait que retarder la relance de l'économie et qui, conséquemment, place les femmes dans une position de vulnérabilité encore plus grande. Michaëlle Jean joint donc sa voix à tous celles et tous ceux qui, en Haïti comme à l'étranger, appelle le président de la République, le Parlement et les membres du cabinet à sortir le pays de cette impasse qui déstabilise le bon fonctionnement des institutions et qui mine la confiance des donateurs et des investisseurs étrangers dans le pays.

Les directions nouvelles

Par l'ascension internationale de cette femme d'une simplicité et d'un naturel esthétique raffinés à première vue, est d'une intelligence et d'une éloquence pertinente. Haïti une fois de plus, peut se féliciter de sa matrice, productrice de génie hautement utile à l'humanité, dans sa quête d'excellence pour des sociétés où toutes les cultures et les civilisations se valent. Contre toutes les formes de stéréotypes, de discriminations sexiste, raciste, etc.

Dans un autre sens, par ce franchissement, les élites haïtiennes devraient espérer, voire même travailler pour qu'à l' avenir, une personnalité d'origine ou de « nationalité haïtienne » (le mot qui fait l'actualité), puisse occuper l'une des plus hautes fonctions de ces institutions régionales et internationales telles l'OEA, l'OIF, l'Unesco, les Nations unies ou d'autres, dont des héritiers de Jean-Jacques Dessalines sont parmi les signataires de leur acte fondateur.

Michaëlle Jean pourrait ainsi devenir en tant que première femme d'origine haïtienne à occuper le poste de gouverneure du Canada, le modèle de référence, la clef pour ouvrir les portes des plus grands cercles politiques et diplomatiques décisifs, dans l'avenir du monde. Grâce à l'esprit d'ouverture et de multiculturalisme du peuple canadien, pour devenir un symbole aux couleurs haïtiennes, qui a bien devancé trois ans plus tôt (en 2005) Barack Obama, le premier président noir des Etats-Unis, en 2008.

Une fois de plus, Haïti, à travers les racines de Michaëlle Jean, qui a gagné le combat à la fois en tant que femme et en tant qu'haïtienne d'origine, a gravi le sommet du monde, où tout n'est pas toujours ronde.
Dominique Domerçant
succes33@yahoo.fr
Amos Cincir
cincir2005@yahoo.fr
source : www.lenouvelliste.cpm

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